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Joseph G.est né dans le Maine et Loire en 1913. Mécanicien de profession, il travaille dans un petit garage de la région. Appelé sous les drapeaux pour son service en 1935, il est affecté au 505ème Régiment de Chars de Combat (R.C.C.) de Vannes, recréé en 1929. Il est ensuite affecté au 510ème R.C.C. stationné à Chalon sur Marne à compter du 1er juillet 1935. Joseph est envoyé à l’Ecole d’Application de l’Infanterie et des Chars à Versailles à partir d'octobre, surement pour parfaire sa connaissance du matériel (période durant laquelle il apprend le morse). Le jeune soldat est nommé caporal le 6 novembre et reste à l’E.A.I.C. renommée Centre d’Instruction des Chars de Combat en décembre 35. Il finit son service militaire avec le grade de sergent de réserve le 15 octobre 1935. Joseph effectue une période d’exercice obligatoire de 5 jours en juin 1939 au 510ème R.C.C. pour maintenir le sergent à niveau mais aussi dans un contexte international tendu dans lequel l’armée a déjà procédé à une mobilisation préventive 1 an plus tôt. La guerre vient bientôt frapper aux portes de France et le jeune Joseph rejoint ler Bataillon de Chars de Combat fraîchement créé.

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Dans la France de l’entre deux guerre, de nouveaux chars voient le jour mais toujours dans la même optique : offrir un soutien à l’infanterie. Ils sont pour la plupart lents, massifs, et ne disposent pas de moyens de communication moderne. D'abord regroupés au seins de régiment, l’armée décide, en août 1939 de dissoudre toutes les formations afin de créer des Bataillons de Chars de Combat (B.C.C.). Ces B.C.C. sont éparpillés sur la ligne de front, affectés aux armées qui les usent comme bon leur semble, le plus souvent en soutien et les emploient par groupes restreints (par compagnie voir par section !). Ces utilisations isolées rendaient les tankistes d’autant plus vulnérables aux attaques aériennes ou aux anti-char. La France ne dispose pas, à la mobilisation, d’unités blindés groupées comme les divisions blindées que l’on retrouve outre Rhin. Les français disposent pourtant d’autant de blindés que la Wehrmacht et pour certains supérieurs à leurs homologues germains ! Plus qu’un manque de moyens ou de matériel efficace, c’est la tactique d’emploi qui a tué l’arme blindé et la création tardive de 2 (puis 3) Divisions de Cuirassés n’y changera rien.

Le 1er B.C.C. est issu du 501ème R.C.C. de Tours. Comptant 577 officiers et hommes de troupes en février 1940, le bataillon est équipé en chars Renault R 35. Ce blindé, solidement blindé et robuste, présente néanmoins de nombreux défauts. Le canon, un 37 mm issu de la première guerre mondiale, se révèle inefficace comme arme antichar face à des blindés tels que le panzer III ou IV et est préférablement utilisé en antipersonnel. Les communications internes entre le chef de char (faisant également office de pourvoyeur et tireur) et le conducteur sont rendues difficiles en l'absence de système radio et la coordination entre blindés est bien illusoire.

 

De part son métier, Joseph est affecté à la section atelier-dépannage de la Compagnie d’Echelon. Il arrive à Tours le 26 août 1939 puis est dirigé sur route vers Mommenheim (dans le Bas Rhin) où le bataillon cantonne à partir du 11 septembre. Face au manque d'entraînement d’une partie des réservistes, le Colonel De Gaulle commandant les chars de la Vème armée (à laquelle est affectée le 1er B.C.C.) établit un camp à Blamont où les unités blindés vont passées à tour de rôle avec des instructeurs.

Il écrit :

3 décembre 1939, Blamont

“Dans le transbordement que nous avons fait, je suis parti un jour plus tôt que je ne l’avais prévu, et encore comme dépanneur de la colonne, aussi suis je arrivé à Blamont notre nouvelle résidence à 9h et demi le soir sans savoir ni où manger ni ou coucher”

“Je suis mieux qu’en Alsace et pour mieux dire, maintenant que nous en sommes partie à Mommenheim et ici en Lorraine, nous sommes mieux accueillis et on se sent revivre car tout le monde parle français au moins et les maisons ressemblent à celles de chez nous et ne sont plus taillées à coup de serpe comme en Alsace”.

 

L’ambiance en Alsace n’est pas très bonne et les rapports avec les locaux, tendus. La population est parfois hostile à ces hommes qui réquisitionnent des terrains et saccagent les champs avec leurs engins. De plus, beaucoup ne parle que le patois locale ce qui accentue le décalage entre les deux groupes.

 

4 décembre 1939

“Il m’arrive d’en être complètement excédé de tous leurs ordres et contre-ordres pour une seule et même chose et surtout ne jamais savoir alors que tout le monde travaillerait mieux et plus vite si plus souvent nous savions où ils veulent en arriver au lieu de défaire pour refaire ensuite ce qu’on vient de finir parce que ces messieurs n'avaient pas prévu ceci ou cela, enfin, on a toujours vu des choses stupides dans ce métiers donc ne nous étonnons outre mesure quand même”

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Durant l’hiver, la Compagnie d’Echelon installe ses ateliers dans le couvent de Reinacker à Reutenbourg dans le Bas-Rhin. Les nonnes s'accommodent de cette présence militaire et préparent les repas pour la troupe. Les bâtiments sont froids et l’hiver 1939 particulièrement rigoureux, le travail extérieur est limité au minimum. Pour Joseph, la situation a de quoi faire sourire et il parle des mécaniciens sales, jurant, comme d’une tache au milieu de ce monde religieux. La drôle de guerre s'éternise et l’enthousiasme des débuts s’efface peu à peu. Les hommes du 1er bataillon construisent un foyer de détente où de petits concerts, pièces de théâtres et projections de films sont organisés.

10 décembre 1939

“Après le dîner, je suis allé au cinéma avec des camarades voir un film de notre marraine ou pour mieux dire de la marraine du 1er B.C.C. Arletty, film abominable sous toutes les formes et immorale en plus de cela, donc tout pour déplaire surtout pour un jociste [nb : Joseph est un ancien des jeunesses chrétiennes]. Aussi, tellement ce film me plaisait, je me suis endormi et mon camarade a du me réveiller au moment du départ.”

7 janvier 1940 

“Avant hier, nous avons eu la visite du Colonel De Gaulle commandant les chars de la Vème armée qui, si il a reconnu que nous étions bien mal pour travaillé n’en a pas moins déclaré que nous allions établir là nos quartiers d’hiver et nous ne prévoyons pas le départ maintenant. Donc adieu nos trop beaux rêves.”

 

16 janvier 1940 

“C’est fort souvent ma petite chérie que le travail dans l’armée est ennuyeux et pour bien des raisons. D’abord manque d’outillage, ensuite mal commandé. On nous a fait démonter des châssis qui n’ont rien, laissé des pièces usagés qu’il faudrait remplacer et alors la conscience de l’ouvrier qui sait travailler se révolte et il rouspète. Ensuite, il faut courir d’un travail à l’autre au lieu d’en finir un d’abord. Ah, s’il fallait travailler comme cela chez un patron on serait bientôt fichu à pied. Enfin, c’est l’armée et je crois qu’on arrivera jamais à la faire évoluer.”

 

17 janvier 1940

“ici il fait comme on dit un froid de canard, nous avons toujours du verglas et un vent terrible. Il gèle dans nos chambres et dehors il fait encore moins 20. Ou est mon Anjou et votre Bretagne ? Il ferait tout de même moins froid qu’ici”

 

A partir du 20 janvier 1940, Joseph est affecté pour un stage d’armurier sur 1 mois se déroulant dans quatre lieux successifs : Suippes, Bourges, Châtellerault et Puteaux. Il passe alors le plus clair de son temps sur des bancs à noircir des cahiers ce qui n’est pas sans lui rappeler quelques lointains souvenirs. Il a alors des cours de chimie, d’explosif et quelques exercices techniques.

Le bataillon, de nouveau cantonné en Alsace, attend… De nombreuses reconnaissances sont effectuées pour préparer le futur champ de bataille. Le sort en décide autrement et le déclenchement de l’attaque allemande le 10 mai 1940 met en alerte les hommes des chars. Les hommes de la C.E. sont dirigés avec le personnel roulant sur Noyon dans l’Oise tandis que les chars suivent sur rails. 

Les chars sont engagés à partir du 5 juin 1940 et combattent fièrement (ne laissant que des chars hors de combat à l’ennemie) jusqu’à l’armistice. Joseph retourne à Angers en juillet 1940 et retrouve sa fiancé avec laquelle il se marie peu après.

 

L’insigne, fabriqué par Arthus Bertrand à Paris est livré dès le début la guerre. On y retrouve un heaume qui surmonte deux canons croisé, emblème également cousue ou épinglé sur les bérets des hommes des chars. En son centre, l’insigne présente une salamandre, tête tournée sur la gauche, crachant du feu. L’animal est devenu, dès 1917, l’un des emblèmes de l’Artillerie Spéciale (et donc des Chars de Combats). Celle ci est entourée d’une couronne de laurier qui lui est souvent associée; ainsi que l’inscription “BATAILLON DE CHAR” et le chiffre “1” dans un écu bleu (couleur traditionnelle des 1ers bataillons dans l’armée française).

Sources :

Historique du 1er BCC : Hommes et matériels - 1939-1940 de Patrick Binet et Silvère Bastien
-> Les deux auteurs ont fait un travail incroyable de reconstitution de l'historique du bataillon et je me suis basé sur leur ouvrage pour compléter mon historique.

http://editions.pbco.fr/1erBCC/1erBCC.html

http://www.collection-insignes-napo39.fr/CHARSDECOMBAT/BCCHERALDIQUE/BCC01HERALDIQUE.html

http://chars-francais.net/2015/index.php/journaux-de-marche/liste-des-journaux?task=view&id=1611

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